Très souvent citée comme influence majeure par les groupes de rock progressif, noisy ou expérimental de ces 30 dernières années, Can a composé entre 1969 et 1979 une douzaine d´albums particulièrement indispensables. Sur son premier disque, le groupe allemand basé à Cologne fait appel à un crooner noir américain particulièrement dépressif et conflictuel qui s´en ira - sur les conseils de son psychiatre - juste après la sortie du premier album "Monster Movie". C´est alors que les musiciens de Can repèrent Damo Suzuki, jeune aventurier japonais errant en Europe, en train de chanter dans un café de Munich. Le soir même il se produira en concert avec le groupe. De toute facon Suzuki n´aime rien tant que l´improvisation; y compris lors des enregistrements studio. Il chante souvent en anglais, parfois en japonais. Doté d´un charisme bizarre, il s´embarque souvent dans des délires vocaux particulièrement inquiétants dont le paroxysme sera atteint sur "Tago Mago", double album complexe et passionnant sorti en 1971, considéré aujourd´hui encore comme la véritable pierre angulaire du Krautrock.

Psychédélique et démoralisé, "Deadlock" est un cri tout autant qu´une expérience. Une guitare stridente semble gémir tout le long du morceau et plusieurs fausses notes viennent ponctuer cette performance live complètement hallucinée. Le public semble partagé entre adoration, consternation et effroi. Les paroles n´ont aucun sens, pourtant Suzuki paraît plus habité que jamais.
Il restera quatre ans au sein de Can, avant de se convertir Témoin de Jéovah et de stopper toute activité musicale pendant dix ans. Can s´orientera après son départ vers un style plus instrumental, hypnotique, ethnic ou ambient, mais toujours aussi radical dans sa singularité.